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Par support > Pièces de théâtre > Les Fées –
1699
(Florent Carton dit) Dancourt, Les Fées
Paris, Ribou, 1699
La paix, temps des spectacles
Dans la première scène du prologue de cette comédie dédiée au Dauphin, la fée des spectacles célèbre le retour de la paix, temps privilégié pour les plaisirs du théâtre.
La fée qui préside aux spectacles paraît seule sur le théâtre, aussitôt que l'ouverture est finie, et elle récite les vers suivants :
Par quel[le] étrange destinée, Moi, Souveraine des plaisirs, Moi, de tous les mortels, l’amour et les désirs, Me trouvai-je seule et presque abandonnée ? Quoi, la scène est sans ornements ? Suis-je donc cette même fée Qui tant de fois aux yeux de la Cour étonnée, Y fis briller mille agréments ? Hélas ! Dans ces heureux moments, Du plus grand des héros j’étais favorisée ; Et quand pour travailler à ses amusements, Ma puissance est presque épuisée, Ose-t-on publier que j’en suis méprisée ? Par les soins importants qu’il doit à l’univers, Il est vrai, près de lui, ma place est usurpée, À dompter cent monstres divers, À tenir la Discorde aux fers, Sa grande âme est toute occupée : Mais parmi la tranquillité, Dont on jouit sous sa puissance, Le Héros glorieux qui lui doit la naissance, Commet à mon expérience, Le soin de quelque nouveauté, Dont l’agrément ou la magnificence, Contente avec éclat sa curiosité, Et soit digne de la présence, De sa jeune postérité. Quel temps à leur plaisir puis-je mieux consacrer, Que celui d’une paix profonde, Qu’un Roi toujours vainqueur vient de nous assurer ? Comme lui quelque jour chargés du soin du monde, Et jaloux comme lui de s’en faire adorer, Tantôt parmi le bruit des armes, Avides de lauriers qu’ils voudront moissonner, Tantôt soigneux au retour des alarmes, D’éterniser la paix qu’ils viendront de donner, Sans cesser d’estimer mes charmes, Ils se verront forcés de les abandonner. Profitons des moments que la gloire leur laisse, Pour goûter d’innocents plaisirs. À leur en faire naître occupons-nous sans cesse, Et jouissons longtemps de leurs heureux loisirs. Vous, mes sœurs, filles fortunées, Qui comblez les mortels des plus rares faveurs, Esprits divins, savantes fées, D’un nouveau zèle animez les auteurs, Choisissez d’excellents acteurs, Rassemblez tout ce qui peut faire Les délices des spectateurs ; Sur tous également versez les dons de plaire, Aux applaudissements disposez tous les cœurs, Qu’à vous seconder tout s’empresse, Que les jeux, les plaisirs amènent les amours, Qu’ils viennent amuser cette auguste jeunesse, Et, s’il se peut, qu’ils la suivent toujours.
Extrait disponible sur Théâtre classique
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