Jusqu’à ce que le bruit des tambours et des trompettes chassa sur le matin le sommeil sans repos et me mena avec Percante au théâtre dressé par Acigne. J’étais assis auprès d’un vieillard fort modeste, la douceur duquel ayant goûtée, je regrettai qu’un homme de moeurs si agréables n’était de mon pays. La conformité de nos moeurs nous eut bientôt rendus amis, car un effort secret nous conviait à l’amitié et je ne sais quel bon génie nous faisait ajouter foi à nos discours. Ainsi, avant que le bruit fût totalement apaisé, nous contemplions le maître du jeu les bras troussés presque jusques au coude, qui donnait ordre tantôt au théâtre, tantôt aux jeux et avec paroles tirées à peine exhortait les auteurs, l’un de se souvenir de la majesté d’un roi, l’autre de l’opiniâtreté d’une femme, qu’ils s’empêchassent de rire et de pleurer et qu’ils représentassent bien les affections qu’ils avaient en partage. Cependant je demandais au bon vieillard si toutes les vertus

[s’ensuit une discussion philosophique]

Ainsi nous tournâmes les yeux vers la scène en laquelle un bel enfant se promenait, qui commença à déclarer l’argument du jeu en vers assez rudes. L’on saignait un jeune homme de bonne et illustre maison, lequel avait préféré le silence d’un désert aux richesses de son père et que les larmes pitoyables de sa mère ni l’autorité du prince n’avaient pu le détourner de sa résolution. Il n’y avait rien plus beau si la fable eût rencontré des Rosces. Mais tous remuaient les épaules selon les pieds des vers, tous par des voix contrefaites corrompaient leur grâce naturelle et en mettant souvent la main à leur barbe montraient qu’ils n’avaient pas accoutumé de tenir gravité.