La base de données « Naissance de la critique dramatique » offre plus de 3000 extraits de textes du XVIIe siècle évoquant les oeuvres théâtrales sous l'angle de… [plus]
Par support > Périodiques, gazettes, … > Lettres en vers –
1666
La Gravette de Mayolas ; Charles Robinet, Lettres en vers
Paris, Muguet, 1666 et Paris, Chénault, 1666.
Spectacle de fin d'année chez les Jésuites
Robinet et Mayolas, dans leur lettre du 8 août 1666, font un compte-rendu de la pièce de fin d'année au collège de Clermont :
[Mayolas]
Il ne faut pas que notre plume
Omette la bonne coutume
Qu’en ce temps elle a chacun an ;
Écrivons donc comme Gusman,
Tragédie en tout achevée,
Fut représentée ou jouée
Dans le collège de Clermont,
Où de grands personnages sont
Enseignants, instruisant sans cesse
La plus florissante jeunesse.
Les danseurs du Ballet du temps
Donnèrent bien du passe-temps.
Ils dansèrent tous d’importance,
Et le maître de cette danse,
L’adroit Chicaneau, qu’on vanta,
Fort dignement s’en acquitta.
Les violons et les trompettes
Touchaient d’aimables chansonnettes,
Et force gens de qualité
De la cour et de la cité,
Mardi dernier là se trouvèrent,
Et divers plaisirs y goûtèrent,
Admirant tous, sans fiction,
La riche décoration
De ce théâtre magnifique
Où parut l’ouvrage héroïque.
Il suffit de dire le nom
De cet auteur de grand renom
Pour savoir si la pièce est belle :
C’est l’éloquent Père Ridelle,
Qui n’est pas moins grand orateur,
Qu’il est bon versificateur,
De qui le génie et le style
Ne doivent rien à feu Virgile.
Les acteurs, richement parés
Et tout à fait bien préparés,
Avec pompe, avec grâce extrême,
Récitèrent ce beau poème.
Bréquigny, qui faisait le roi, [des Maures.]
Le faisait fort bien, sur ma foi ;
Le second joua bien son rôle [Fils du roi.]
Et du geste et de la parole :
C’était l’aimable de Breteuil,
Qu’on voit en tous lieux de bon œil ;
Ce fils d’un très illustre père
Et d’une très parfaite mère,
Le septième de leurs enfants [mâles.]
Qui sont en vertus triomphants,
Dont l’âme se voit occupée
Et dans la robe et dans l’épée,
Ce fils emporta les cinq prix,
Récompense des beaux esprits,
Et ces cinq en font vingt-et-quatre,
Dont il n’en faut que deux rabattre,
Qu’il a dignement moissonnés,
Dont ses travaux sont couronnés.
De la Ferté, dans son jeune âge, [30 ans]
Y fit fort bien son personnage,
Dansa de plus fort galamment
Et reçut un prix justement :
On voit bien par ce qu’il sait faire
Que c’est le modèle du père,
Comme Manican et Poncet,
Qui, sans mentir, ont fort bien fait,
Et tous enfin, que dans ma lettre
Entièrement je ne puis mettre :
Rouvry, Langeron et Crissé,
Et de Vilène ont bien dansé.
Quantité d’autres, que j’honore,
Eurent alors des prix encore,
Quoiqu’acteurs ils ne fussent pas
Dans cet acte rempli d’appâts,
Dont j’étais le témoin à l’ombre ;
Et, parmi ce rang et ce nombre,
En ce beau champ si bien ouvert,
J’ouïs nommer Seignelay-Colbert,
Digne fils d’un père sublime,
Qui s’acquiert une haute estime,
Et les trompettes à ce nom
Rehaussant leur ton et leur son,
Jouant et faisant des merveilles,
Flattaient doucement les oreilles
De ce grand nombre d’assistants
Qui s’en allèrent fort contents.
[Robinet]
Au COLLÈGE des JÉSUITES,
Pères savants, bons casuistes,
Bref, artisans des beaux esprits,
Mardi l’on délivra les prix
Fondés par le Roi notre sire,
Qui des lettres chérit l’empire,
Pour animer les studieux,
Qui se font grands hommes chez eux,
Une tragédie excellente,
Dont la scène était fort brillante,
Et même le Ballet du temps,
Des plus moraux et plus galants,
Cette action accompagnèrent
Et tous les spectateurs charmèrent.
Transcription de David Chataignier disponible sur le site Molière21.
Pour indiquer la provenance des citations : accompagner la référence de l’ouvrage cité de la mention « site Naissance de la critique dramatique »