En effet, si nous expliquons nos sentiments sur les ouvrages d’un auteur pour qui nous n’ayons eu que de l’indifférence et que par un discernement trop exact nous distinguions les bons et les mauvais endroits avec trop de sévérité ou que nous les défendions faiblement, il peut nous reprocher que nous avons eu jalousie de sa réputation, que nous avons voulu élever notre gloire sur les ruines de la sienne, et que nous sommes plutôt les critiques que les juges désintéressés de ses oeuvres. Si au contraire nous parlons des ouvrages d’un ami, que la passion que nous avons pour lui nous le fasse voir plus grand qu’ils ne sont en effet et que par une innocente tromperie nous tâchions de les montrer de la même manière aux autres, le lecteur nous reproche aussitôt, ou que nous nous sommes laissé aveugler, ou que nous l’avons voulu éblouir, dérober ses louanges et surprendre son approbation.