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1666
Armand de Bourbon, Prince de Conti, Traité de la comédie et des spectacles
Paris: L. Billaine, 1667
L’hypocrisie des poètes modernes
Dans sa rude critique des dangers du théâtre moderne, le Prince de Conti dénonce notamment l’hypocrisie des poètes, consistant à donner une apparence de respectabilité à leur œuvre d’empoisonnement public. L’exemple de la tragédie Cinna montre bien que l’introduction de quelques répliques morales ne change rien à l’effet global sur les spectateurs.
Telle est la corruption du cœur de l’homme, mais telle est aussi celle du poète, qui après avoir répandu son venin dans tout un ouvrage d’une manière agréable, délicate et conforme à la nature, et au tempérament, croit en être quitte pour faire faire quelque discours moral par un vieux roi représenté, pour l’ordinaire, par un fort méchant comédien, dont le rôle est désagréable, dont les vers sont secs et languissants, quelque fois même mauvais, mais tout du moins négligés, par ce que c’est dans ces endroits qu’il se délasse des efforts d’esprit qu’il vient de faire en traitant les passions. Y a-t-il personne qui ne songe plutôt à se récréer, en voyant jouer Cinna, sur toutes les choses tendres et passionnées qu’il dit à Emilie, et sur toutes celles qu’elle lui répond, que sur la clémence d’Auguste, à laquelle on pense peu, et dont aucun des spectateurs n’a jamais songé à faire l’éloge en sortant de la comédie?
Traité disponible sur Gallica, p. 34-36
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