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[Anonyme], L’Inconnu et Véritable Ami

Comparaisons du répertoire

Dans le contexte de la querelle du Cid, l'auteur de ce texte évalue les productions contemporaines :

On trouve fort étrange que Monsieur Corneille, qui est sage, et doit être sans présomption et vaine gloire, voulût prétendre un degré de prééminence au dessus de Monsieur de Scudéry, qui a fait une infinité des plus beaux poèmes qui se jouent à présent sur le théâtre ; et n’y a personne qui ne dise que c’est lui faire tort de blâmer ce qu’il nous donne et qu’il laisse à la mémoire, qui est (n’en déplaise au Cid) aussi bon, ou meilleur que lui, soit en gros ou en détail, de loin ou de près, encore qu’il ait plu à celui qui a fait réponse pour la voix publique, sans en avoir eu charge ni procuration, de rendre une injustice à L’Amant libéral, qui appelle de son jugement inique. C’est une des plus belles et riches pièces que nous ayons, et dont l’invention est inestimable. Ce joli personnage sans commission ne l’a pas bien considérée, ou il n’a pas l’esprit assez fort, et le jugement assez solide, pour remarquer sa valeur, que les plus grossiers et les moins entendus à ce divin métier reconnaissent ; il me semble qu’il ne fera jamais de honte au Cid, de marcher pair à pair avec lui, non pas même quand il prendrait la droite. Je ne nie pas néanmoins la beauté du Cid, non plus que le mérite de son auteur ; il n’y a point de créatures qui, selon son tempérament, n’aime des sujets convenables à ses humeurs, et tel trouvera L’Amant libéral à son goût, qui ne donnera pas après sa voix au Cid, et ainsi du contraire […]. Bien qu’il y ait quantité de gens dénaturés et sans jugement, qui ont aversion pour les beautés, et qui trouvent mauvais que Bellerose sur son théâtre donne nom à L’Amant libéral, le chef d’œuvre de Monsieur de Scudéry, ce beau poème ne perd rien de son éclat pour cela.

Extrait signalé par Sandrine Blondet
dans La Querelle du Cid, éd. J.-M. Civardi, Paris, Champion, 2004, p. 558-559


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