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1682
Madame de Sévigné, Lettre à M. de Bussy-Rabutin
Rire de l'Arioste
Dans cette lettre à Bussy-Rabutin datée du 23 décembre 1682, Madame de Sévigné discute la pertinence d'une décision radicale en matière de morale sexuelle prise par Mlle de Beauvais. Cet extrait montre bien comment le théâtre intervient dans l'argumentation pour illustrer le propos de l'épistolière :
Cependant je vous dirai que l'amour fait ici des siennes. M. le comte de Soissons a déclaré son mariage avec Mlle de Beauvais. Le Roi a fort bien reçu cette nouvelle princesse. Elle parut belle et modeste. On dit qu'elle s'est mariée il y a deux ans et demi, et que, de peur que la jouissance ne refroidît les feux du futur, elle n'a accordé aucune faveur que le lendemain des vingt-cinq ans, qui fut justement vendredi dernier. Il y a beaucoup à dire, et nous pourrons bien discourir sur ce sujet, quelque jour que vous dînerez ici à votre retour. A-t-elle bien fait ? A-t-elle mal fait ? Quand un homme de cette qualité donne la plus grande marque d'amour que l'on puisse donner, en épousant, est-on deux ans et demi sans lui faire voir autre chose qu'une parfaite et unique ambition, soutenue d'une grande défiance et d'une extrême froideur ? Pour moi, je me souviens d'un vers de l'Arioste, dont j'ai ri autrefois : Angélique avait couru les quatre coins du monde, seule avec Roland, et on assure le lecteur qu'elle était aussi entière que quand elle était sortie de chez son père et l'auteur dit :
Forse era ver, ma non pero credibile
« Peut-être cela est-il vrai, mais il n'est pas vraisemblable ».
Sévigné, Correspondance, éd. R. Duchêne, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1985, vol. III, p. 91.
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