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1658

Pierre Corneille, Lettre à l'abbé de Pure

Beauté des comédiennes

Le 19 mai 1658, le dramaturge imagine le succès de la tragédie de l'abbé de Pure à l'Hôtel de Bourgogne et donne des nouvelles des comédiennes.

Cependant je me réjouis du secret que vous avez trouvé de me faire faire des souhaits pour les avantages de MM. de l'Hôtel de Bourgogne. J'apprends que vous leur donnez une pièce de théâtre qu'ils se préparent à représenter dans peu de temps. J'en attends le succès avec impatience, et je me le figure déjà aussi glorieux que je le souhaite, non pas tant à cause que vos amis les plus éclairés publient qu'ils n'ont rien vu de plus achevé, que parce que je suis convaincu qu'il ne peut rien partir de vous qui n'en soit digne.
Le mariage de mademoiselle le Ravon, si précipité, est une aventure assez surprenante, mais pour moi, je n'y en vois pas davantage qu'au voyage de M. de Beauchâteau en Angleterre. Il a voulu produire son cher fils à l'altesse protectrice ; et elle s'est lassée du veuvage. Je m'imagine que ses camarades ont été assez alarmés de son dessein, dans l'appréhension qu'elle ne choisît pas un mari d'assez bonne humeur pour lui souffrir encore la comédie. Nous attendons ici les deux beautés que vous croyez devoir disputer cet hiver d'éclat avec la sienne. Au moins ai-je remarqué en mademoiselle Rejac grande envie de jouer à Paris ; et je ne doute point qu'au sortir d'ici cette troupe n'y aille passer le reste de l'année. Je voudrais qu'elle voulût faire alliance avec le Marais ; elle en pourrait changer la destinée. Je ne sais si le temps pourra faire ce miracle, mais je sais que ses changements n'auront rien assez fort pour diminuer l'ardeur avec laquelle je chercherai, toute ma vie, les occasions de vous témoigner avec quelle passion je suis,
Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Corneille.

Lettre en ligne sur Google Books, édition de 1843, p. 750.


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