Les grandes conquêtes du roi et les importantes victoires qu’il a remportées sur ses ennemis ayant mis la gloire de la France au plus haut point où elle ait jamais été, tout le monde a tâché à l’envi d’en témoigner de la joie en différentes occasions, ou par des réjouissances particulières, ou par des divertissements publics. C’est ce qui a donné lieu à ces admirables feux d’artifice qui ont attiré tout Paris les dernières années ; et c’est ce qui le donne encore aujourd'hui aux comédiens de la troupe du roi, de tâcher à signaler leur zèle par tout ce que la scène est capable de produire de merveilleux. L’honneur qu’il a plu à S.M. de leur faire, en donnant ses ordres pour leur rétablissement, les mettait dans une continuelle impatience de faire voir qu’ils conservent toujours la même ardeur de pouvoir être jugés dignes de contribuer à ses plaisirs ; et c’est dans cette vue qu’ils ont mis tous leurs soins à rendre Circé le spectacle le plus pompeux qui ait paru jusqu’ici sur nos théâtres. Tout y est grand, tout y est extraordinaire ; et si j’avais pu répondre par la force des pensées et par la majesté des vers, aux superbes ornements qu’on m’a prêtés, je pourrais dire sans trop de présomption qu’on n’aurait point encore vu d’ouvrage plus achevé. La diversité des machines, et l’inconcevable mouvement des vols qui se font dans tous les actes, ont quelque chose de si surprenant qu’on sera aisément convaincu que l’exécution n’en peut partir que du plus sublime génie qui se soit jamais appliqué à ces sortes de connaissances. Tout ce que j’en pourrais dire serait tellement en dessous de ce qu’on verra, que je ne diminuerai point le plaisir de la surprise par l’inutile description des merveilles qui paraîtront dans ce magnifique spectacle.