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ca. 1687

Gédéon Tallemant des Réaux, Manuscrit 673

éd. de Vincenette Magne, Paris, Klincksieck, 1994.

Sur Achille et Polyxène

Parmi les pièces que nous conserve le manuscrit 673 de Tallemant de Réaux, on trouve ces deux pièces en vers sur l'opéra Achille et Polyxène de Campistron, Lully et Collas.

Entre Campistron et Colasse
Grand débat s'émeut au Parnasse
Sur ce que l'opéra n'a pas un sort heureux.
Aucun d'eux ne s'en croit coupable.
L'un dit que la musique est plate et misérable,
L'autre que la conduite et les vers sont affreux
Et le grand Apollon, toujours juge équitable,
Trouve qu'ils ont raison tous deux.

p. 655 : Abrégé de l'histoire de l'opéra de Campistron par le Chevalier de Saint-Gilles

Or écoutez la noble histoire
De l'opéra de Campistron.
J'en veux assurer la mémoire
Par cette immortelle chanson. [note ms : « Style de Campistron. Achille dit cela »]
Agamemnon outrage Achille,
Qui dit qu'il s'en repentira,
Puis se promène dans une île.
Vénus lui donne l'opéra,
Patrocle meurt, Hector l'assomme.
Certes, ce fut mal à propos,
Car on voyait dans ce jeune homme
Tous les sentiments des héros.
Achille, en son humeur bourrue,
Chasse Vénus fort brusquement.
Il s'embarque, il combat, il tue.
Hector descend au monument.
Le roi Priam, sa bru, sa fille,
Ont tous trois le cœur bien serré.
Polixène est assez gentille,
Achille la trouve à son gré.
C'en est fait, ce héros l'adore.
Arcas en va dire deux mots.
Briseis croit qu'on l'aime encore.
Achille lui tourne le dos.
Cette princesse m'embarasse,
Où couchera-t-elle ce soir ?
Chez Agamemnon plus de place.
Achille ne veut plus la voir.
Briseis est fort alarmée.
Junon lui montre les enfers.
Les diables font de la fumée,
La clarté revient dans les airs.
Au premier bruit de quelque trève,
Les villageois s'en vont dansant,
Avant que le traité s'achève.
Ils voudraient labourer le camp.
Polixène veut bien se rendre.
Andromaque a beau raisonner,
Et les almanachs de Cassandre
N'ont rien qui puisse l'étonner.
Tous les beaux conseils qu'on lui donne
Ne sont bons que pour l'enflammer.
Un cœur que le péril étonne
N'est ma foi pas digne d'aimer.
Priam reçoit dans sa famille
L'invincible enfant de Thétis,
Trop heureux de donner sa fille
Au dur vainqueur d'Hector son fils.
Un changement si favorable
Comble aujourd'hui ses bons désirs.
Aurait-il cru son coeur capable
D'avoir encore quelques plaisirs ?
Vous, que votre sort intéresse
Dans cet événement heureux,
Peuples, montrez votre allégresse,
Par les ébats les plus pompeux.
Polixène semble interdite
Devant son époux prétendu.
On ne sait ce qu'elle médite.
Achille en est tout confondu.
Ô parlez donc, beauté charmante,
M'aimerez-vous de bonne foi ?
Monsieur, je suis obéissante,
Mon papa répondra pour moi.
Bref, Paris assassine Achille.
Polixène l'a vu frapper.
Du même trait elle s'enfile.
La toile tombe, on va souper.
Or vous savez la noble histoire
De l'opéra de Campistron.
J'en ai consacré la mémoire
Par une éternelle chanson.

Tallemant des Réaux, Manuscrit 673, éd. de Vincenette Magne, Paris, Klincksieck, 1994, p. 654.


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